Dimanche 9 janvier 2011 à 23:25
Il faut classer la vie comme les boites du grenier. Il faut commencer à écrire en disant: voilà, ici, je vais parler de moi, sans jamais dire ma vie vraiment, je vais vous dire le monde à travers moi, mes emportements, mes désespérances.
Le garçon effaré m'a dit: mais c'était décevant, le voyage en Ecosse ? Le voyage. Comme si ce n'était ni tout à fait le mien, ni tout à fait extérieur à lui, en un mot il mythifiait la chose. Ce n'était plus mon évasion déçue, ma fascination face à des villes et des campagnes chaque fois plus exacerbées, déprimantes par leur bouillonnement, vivantes de tout leur médiéval. Le voyage, c'était ce dont j'avais parlé, mes projections, mes racontars sur le retour, c'était une idée spéciale du voyage, qu'ils avaient tous vu à travers moi.
Je ne peux pas parler de ce voyage parce que je suis restée là-bas, autant que j'y ai abandonné mon amie. Elle m'a tuée là-bas. L'Ecosse c'était la vie, elle et moi c'était tout sauf la vie. Alors le voyage a fini elle et moi. Je suis morte en Ecosse. Sauf ce germe en moi. Ce grain. Cette envie folle, cet espoir, ce qui me secoue les tripes, me pend au cou, et entraîne mon corps. Cette vie qui pique, qui pétille, qui explose ! Ce bond, cette implosion. Ce cri.
En fait, tu m’as brisée. Tu as tué le morne en moi. Je suis un cri, toute entière. Je suis la vie. Tu as été la germination de ma folie et de mon envie de vivre.
Si l’on ouvrait mon ventre, là telle que je suis, d’un coup de poignard, de haut en bas, « éventrer », purement, il n’en sortirait que de la lumière. Eclatante. Je bous de vivre. Toujours plus. Dégrafer les liens. Et courir jusqu’à rejoindre cette magie première, hurler et courir pour nouer à moi la vie.